Ariel lave plus blanc que blanc
Depuis quelques semaines, Ariel Wizman s’en prend plein la gueule. Lui, l’icône du milieu branché parisien, a osé se compromettre avec le ministère de l’Industrie dans le cadre de la lutte contre le piratage. Il prête sa voix à un discours moralisateur diffusé dans de faux MP3 disséminés sur les plates-formes de peer-to-peer. Effroi donc le 21 décembre quand la dépêche AFP tombe.
La nouvelle fait scandale. Le contraste entre la personne d’Ariel Wizman et le combat qu’il défend est trop manifeste. Ainsi on exhume des propos qu’il a tenu en février dernier dans Libération : « Le juke-box portable, c’est dans la poche ». Une époque où le téléchargement légal n’était que balbutiant…
Et très vite, le petit monde des blogs et autres forums s’énerve. Ariel Wizman est cuit, il passera des sales fêtes de fin d’année. Sifflé partout où il passe, ridiculisé dans toutes les soirées parisiennes, il a décidé début janvier de stopper le massacre. Il appelle donc Libération et deux sites Internet influents pour essayer tant bien que mal de s’excuser.
Voilà la version qu’il donne alors à Chryde de blogotheque.net :
« Je reçois un jour un coup de fil, on m’explique que Devedjian me cherche. Je suis d’accord, on m’appelle de nouveau, on m’explique qu’ils cherchent une voix pour faire passer un message de prévention, parce qu’ils sont contre la répression. J’accepte, je vais en studio, je fais la voix sans vraiment bien comprendre. Je n’ai pas été payé, je n’ai eu aucun avantage, je n’ai même pas vu les mecs responsables de l’opé.
Quand la fronde a commencé, je me suis aperçu que j’avais déconné. Ils avaient fait de moi l’étendard de la lutte anti-piraterie, dont j’ai rien à foutre. Je ne suis ni pour ni contre, je trouve que leur politique par l’exemple est ignoble. Je ne suis pas cynique, et aujourd’hui je comprends que les gens soient déçus. J’ai un peu bêtement pensé qu’ils avaient besoin d’une voix, pas de la mienne. Voilà, il ne faut pas que les gens pensent que je vais remplacer Pascal Nègre dans leur inconscient. J’ai appelé le ministère de l’Industrie, pour qu’ils corrigent tout ça. »
Bref, on a mal pour Ariel Wizman qu’on aimait beaucoup mais on ne croit pas une seule seconde à sa version. Le bonhomme est trop intelligent pour s’être fait avoir. Il n’a simplement pas mesuré l’ampleur de la réaction qu’il allait susciter. Car on ne touche pas comme ça au MP3. Le format est maintenant sacro-saint, tellement ancré dans la vie moderne que quiconque ose le dénoncer passe rapidement pour un Pascal Nègre de bas-étage.
Le téléchargement gratuit est un avantage acquis. Le dénoncer, c’est comme revenir sur les congés payés ou la semaine de 35 heures. Le MP3 va dans le sens du vent, dans le sens de l’incessante marche du progrès. Ariel Wizman a fait l’erreur de croire qu’on pouvait cautionner une cause juste (les droits d’auteur) mais contraire au mouvement vital de l’époque. Son biographe (s’il en a un jour un) sera bien emmerdé par ce sinistre épisode de sa vie. On ne peut pas être jeune, branché et rétrograde.
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