Extension du domaine de la création
Michel Houellebecq n'a pas fait que des livres. Dans une zone moins explorée de sa biographie, on trouve une réjouissante production discographique. C'est en 2000 que Bertrand Burgalat lui donne l'occasion d'enregistrer son premier album, Présence Humaine. Pour l'occasion, les prometteurs A.S. Dragon jouent au backing band de luxe. Bref, tout est réuni pour un grand disque.
Le disque sort et il est effectivement très bon. Et pourtant, une certaine indifférence flotte autour de l'objet. Comme si le monde mou et résigné dépeint par Houellebecq s'était matérialisé autour de ses espérances musicales. Comme si le vieux dicton tout pourri qu'on nous ressert à toutes les sauces ("En France, on range les artistes dans des cases") avait cette fois-ci marché. Houellebecq est un ecrivain, point, semblait dire le mass-media.
Pourtant, je le soutiens, le disque est bon. Michka Assayas a dit une chose assez juste qui résume bien mon sentiment général : "La façon dont il prononce Wagon Alsthom me fait personnellement tressaillir". Houellebecq est en effet un poète du néant moderne, du vide technologique. D'autant que cette émotion froide, ce détachement ironique sont superbement mis en musique par un Bertrand Burgalat qui n'a visiblement pas gardé toutes ses bonnes compos pour sa copine Helena Noguerra.
Paris-Dourdan est la meilleure chanson de l'album. Le récit désabusé d'un voyage en RER, dans un instant suspendu où rien ne va plus, où tout dérape et où "les salariés bougent rapidement". La force de Michel Houellebecq est de capter ce vide au milieu du mouvement. Un fossé s'ouvre : les arrangements de Burgalat nous y précipitent.
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