21 mai 2006

Un General nordiste de New York


Certain General - Only A Dream (MP3)
Certain General - Dachau Now (MP3)
Certain General - Fly Me To Berlin (MP3)

La hype 2005 vaut-elle la hype 1985 ? J'ai découvert les New-Yorkais de Certain General il y a quelques mois, grâce à un papier de Technikart où on les comparait, buzz oblige, à leurs compatriotes de Clap Your Hands Say Yeah. Un parallèle quelque peu exagéré : CYHSY a été courtisé par les maisons de disques quelques mois après son explosion sur le Net, alors que Certain General, lui, dut attendre l'offre d'un label français (L'Invitation au Suicide, basé au Havre) pour publier November's Heat, son premier album, puis son mythique EP These Are The Days (dont on peut écouter des extraits, en qualité très médiocre, ici). Les musiciens iront jusqu'à se surnommer eux-mêmes "le groupe invisible de New York".

Méprisé dans son propre pays, aimé dans l'Hexagone : le phénomène n'est pas nouveau, et se reproduira par la suite (le cas Jeff Buckley, notamment, bien plus populaire chez nous). Le romantisme noir de Certain General séduit la France, et November's heat est élu album de l'année 1984 par plusieurs journaux. Le groupe a même droit à la une et un portrait d'une page dans Libération en février 1985...

Presque une aberration tant cette musique, tiraillée entre son cerveau new-yorkais (la scène post-punk symbolisée à l'époque par Liquid Liquid, ESG ou les Sonic Youth débutants, tous regroupés, ainsi que Certain General d'ailleurs, sur les deux compilations New York Noise) et ses jambes anglaises, a peu pour faire danser les foules. D'Outre-Manche, Certain General a en effet ramené du noir à broyer : le psychédélisme punk pulvérisé du Unknown Pleasures de Joy Division (l'intro de Only a dream ressemble d'ailleurs beaucoup à celle de Ceremony, le premier single de New Order) et la rigueur martiale et fiévreuse du Heaven Up Here de Echo & The Bunnymen.

Forcément, avec de telles influences, le climat est agité. Les mots November's Heat s'affichent sur une photo sépia de marais et, en terme de froidure hivernale et de miasmes, on est servis. Les instruments cinglent comme une grêle monocorde sur une fenêtre, le chant ténébreux de Parker Dulany emmène l'auditeur en salle de tortures : c'est Dachau now, plus Joy Division que jamais. Mais parfois, soudainement, les guitares s'éclaircissent à l'horizon, le refrain devient plus pop et on passe de la cold-wave gothique à un rock presque délicat (Only a dream) ou un post-punk vif proche de Gang Of Four (Fly me to Berlin, enregistré en mai 1981 et produit par Peter Holsapple des dB's). Ne jamais oublier une chose : depuis 1967, la plupart des groupes new-yorkais descendent du Velvet, soit le groupe qui a su aussi bien composer Sunday Morning que European Son.