18 mai 2005

"A young man, a weight on his shoulders..."


Joy Division – Walked in line (MP3)
Joy Division – Love will tear us apart (Peel session) (MP3)
The Smashing Pumpkins – Isolation (MP3)
Massive Attack – New dawn fades (MP3)

« J’ai plutôt des bons souvenirs de Ian Curtis. » Ce n’est pas moi qui le dit, c’est Tony Wilson (incarné par Steve Coogan) dans 24 hour party people, le film sur la scène rock de Manchester réalisé par Michael Winterbottom. Ian Curtis s'est suicidé il y a 25 ans, le 18 mai 1980 : dans le film, on le voit fébrile, énervé, tendu, loin de l’image d’Epinal du « martyr des années new wave », de « l’ange noir des eighties », et autres âneries.

Comme tout groupe culte, Joy Division a engendré de profonds malentendus : beaucoup le voient encore aujourd’hui comme une formation triste, dépressive, à la noirceur complaisante. Un simple coup d’oreille sur les disques suffit à prouver le contraire. Unknown pleasures (1979) évolue sur le fil du rasoir. Celui d’un rock cisaillé par les échardes de guitare de Barney Sumner, affolé par la basse souple de Peter Hook, abruti par une basse métronomique de Stephen Morris. Enfiévré, pour finir, par la violence contenue de la voix de Curtis : c’est par exemple Walked in line, titre de la première époque du groupe, présent sur la compilation Still. Closer (1980) n’aborde pas davantage le thème de la dépression : c’est le disque d’après (la mort, la chute, la disparition), étrangement serein et apaisé : Martin Hannett, producteur du groupe, avait conseillé à Curtis de « chanter comme Sinatra ». L’introduction des synthés n’avait pas transformé le groupe en escroquerie new age : la version Peel session de Love will tear us apart, un brin plus tendue que sur le single, en est une bonne illustration.

Aujourd’hui, quand on regarde la descendance de Joy Division, on trouve toujours des groupes qui ont su conserver cette tension, cette urgence. Les Smashing Pumpkins reprennent Isolation, version boîte à musique minimaliste zébrée de scratches. Massive Attack, lui, livre une reprise superbement habitée de New Dawn Fades. Ces deux groupes pourraient reprendre à leur compte cette phrase (de Jankelevitch, je crois) qu’on aurait bien imaginé figurer dans le livret d’un disque de Joy Division : « Mieux vaut la culbute que le déclin. »