Martin Hannett, the comforts of madness
The Only Ones – Oh Lucinda (Love becomes a habit) (MP3)
The Buzzcocks – Strange thing (MP3)
The Stone Roses – So Young (MP3)
Martin Hannett sous la plume de Laurent Rigoulet : « Sur Closer, le dernier album de Joy Division, je cherchais à pousser encore plus loin la recherche d'une ambiance sonore. J'ai trouvé toutes sortes de procédés de réverbération. J'entrais des chiffres cabalistiques dans l'ordinateur. J'avais le sentiment de faire de la magie, j'étais orgueilleux. Je me disais : "Ce disque, c'est moi qui l'ai fait, on souffre quand on l'écoute !" Après coup, je me suis demandé si je n'étais pas allé trop loin dans la cristallisation de cette douleur. »
Quand Martin Hannett est mort, le rock n'a pas seulement perdu un grand producteur, il a surtout perdu un fou. Un grand producteur doit être fou, être persuadé que son esprit saura remodeler à sa guise les visions d’un autre, souvent fou lui aussi. Spector et son revolver pointé en pleine séance sur Leonard Cohen, Eno et son cerveau surdoué, Hannett enregistrant les bruits d’un vieil ascenseur pour les mêler à ceux de la batterie : des fous. Ou des infirmiers psychiatriques ?
Les productions d’Hannett (un peu comme celles de Eno d'ailleurs, sur Fear of music par exemple) sont des camisoles de force. Basse qui rebondit sans cesse sur le morceau telle une superballe sur des murs capitonnés, guitares et batterie martelées comme le sang qui cogne aux tempes du patient. Un carcan qui, comme toute camisole, contient les élans du malade tout en le rendant furieux.
Ouvrons le dossier médical : trois crises de folie inachevées (dont deux ne sont pas disponibles sur la compile Zero : A Martin Hannett Story), trois groupes avec lesquels Hannett n’aura jamais publié d'album complet. Les prémices : Oh Lucinda (Love becomes a habit), superbe chanson du troisième album des Only Ones, Baby's got a gun, ici réenregistrée sous l’égide d’Hannett. A la douceur de ballade mortuaire de l’original, blanche héroïne, cette version alternative substitue une cavalcade affolée, chantée brute, plus garage, où le pouls du chanteur Peter Perrett s’accentue, accélère, s’affole insensiblement, les mots se chevauchant jusqu’à la gorge qui tremble (« Ooooohhh Lucinda… »). Les symptômes : Strange thing, un des derniers titres des premiers Buzzcocks, définitivement oublieux des sucreries pop-punk de leurs débuts pour une new wave martiale, militaire, malaisante. L’acmé : So Young, premier single des Stone Roses, où est déjà présente la fièvre du futur album - rythmique entraînante, chant fervent de Ian Brown - sans l'extase Madchester. Un morceau presque aigre, parfois. Fièvre jaune.
Après les roses de pierre, Hannett ira voir chez des joyeux fous, les Happy Mondays, avant de s’éteindre il y a presque quinze ans jour pour jour, le 18 avril 1991. Dix ans après, pour son film 24 hour party people, Michael Winterbottom choisira pour l'incarner l’acteur Andy Serkis. Le même qui jouera à la même époque Gollum dans la trilogie du Seigneur des anneaux. Vous savez, cette créature qui profite d’un anneau pour agir de manière invisible, avant de mourir, consumée par son pouvoir…
Quand Martin Hannett est mort, le rock n'a pas seulement perdu un grand producteur, il a surtout perdu un fou. Un grand producteur doit être fou, être persuadé que son esprit saura remodeler à sa guise les visions d’un autre, souvent fou lui aussi. Spector et son revolver pointé en pleine séance sur Leonard Cohen, Eno et son cerveau surdoué, Hannett enregistrant les bruits d’un vieil ascenseur pour les mêler à ceux de la batterie : des fous. Ou des infirmiers psychiatriques ?
Les productions d’Hannett (un peu comme celles de Eno d'ailleurs, sur Fear of music par exemple) sont des camisoles de force. Basse qui rebondit sans cesse sur le morceau telle une superballe sur des murs capitonnés, guitares et batterie martelées comme le sang qui cogne aux tempes du patient. Un carcan qui, comme toute camisole, contient les élans du malade tout en le rendant furieux.
Ouvrons le dossier médical : trois crises de folie inachevées (dont deux ne sont pas disponibles sur la compile Zero : A Martin Hannett Story), trois groupes avec lesquels Hannett n’aura jamais publié d'album complet. Les prémices : Oh Lucinda (Love becomes a habit), superbe chanson du troisième album des Only Ones, Baby's got a gun, ici réenregistrée sous l’égide d’Hannett. A la douceur de ballade mortuaire de l’original, blanche héroïne, cette version alternative substitue une cavalcade affolée, chantée brute, plus garage, où le pouls du chanteur Peter Perrett s’accentue, accélère, s’affole insensiblement, les mots se chevauchant jusqu’à la gorge qui tremble (« Ooooohhh Lucinda… »). Les symptômes : Strange thing, un des derniers titres des premiers Buzzcocks, définitivement oublieux des sucreries pop-punk de leurs débuts pour une new wave martiale, militaire, malaisante. L’acmé : So Young, premier single des Stone Roses, où est déjà présente la fièvre du futur album - rythmique entraînante, chant fervent de Ian Brown - sans l'extase Madchester. Un morceau presque aigre, parfois. Fièvre jaune.
Après les roses de pierre, Hannett ira voir chez des joyeux fous, les Happy Mondays, avant de s’éteindre il y a presque quinze ans jour pour jour, le 18 avril 1991. Dix ans après, pour son film 24 hour party people, Michael Winterbottom choisira pour l'incarner l’acteur Andy Serkis. Le même qui jouera à la même époque Gollum dans la trilogie du Seigneur des anneaux. Vous savez, cette créature qui profite d’un anneau pour agir de manière invisible, avant de mourir, consumée par son pouvoir…
<< Home