11 octobre 2007

Sauvons Baxter



Baxter Dury - Auntie Jane (MP3)
Baxter Dury - Francesca's Party (MP3)

J’aime et je défends la cause de Baxter Dury pour des raisons musicales évidentes, mais aussi parce qu’il porte en lui un renoncement à comprendre le monde assez attachant que je partage moi-même à mes nombreuses heures perdues. Fils de, mais fils de punk édenté, Baxter m’a toujours donné cette impression de type désabusé. Un regard détaché et alcoolisé, jeté sur un milieu qu’il semble conchier sincèrement. Rien avoir avec un dépressif de fonction ; l’humanité le fait rire, mais rire jaune. Quand il pompe sans permission Heroes à Bowie avec un naturel désarment pour Sister Sister, il ne s’excuse même pas. Les avocats peuvent toujours venir lui sucer les derniers pounds qui lui restent.

Si Papa Dury braillait à la santé des soirs de biture, Baxter murmure pour les lendemains qui déchantent, les lendemains vitreux réveillés par une gorge en feu, les lendemains qui puent la clope, le regret et les boissons bons marchés quand elles existaient encore.

Chez Rough Trade, ses voisins de catalogue étaient jeunes, désirables, le monde prostré à leurs Converses. Ils s’appelaient les Strokes et les Libertines (qui ne portaient pas de Converses mais bon), de l’histoire déjà. Baxter traîna un temps avec les derniers comme on assiste à un carambolage sur l’autoroute. A distance. Sur Rough Trade, il ne vendît pas la queue d’un album avec Len Parrot’s Memorial Lift et Floor Show, pourtant deux fois neuf merveilles pluvieuses. C’était prévu, immérité, logique, dégueulasse. On avait déjà eu notre dose des songwritters poisseux, des fonctionnaires de la sinistrose en mi mineur, marre de cet artisanat larmoyant. Sauf que Baxter tient plus de l’austère qui se marre. En moins jospinien, on dira qu’il ne prend pas sa propre mélancolie au sérieux. Il y a toujours un sourire qui traîne, une ironie sous-jacente, une rythmique presque enlevée. Mais le spleen reprend toujours ses droits, il déborde sur ses envies de pondre une pop-song un tant soit peu innocente. Au fond, on sent bien qu’il voudrait que ses chansons soient moins bégueules, plus directes dans leurs manières. Francesca’s Party ressemble à la parabole de la plus belle fille du lycée, celle qui préfère se morfondre chez elle que de s’abaisser à fréquenter ses condisciples.

Depuis la sortie de Floor Show, deux années sont passées et Baxter se terre malgré lui. Plus de label semble-t-il, seul un titre inédit sur son MySpace comme signe de vie. Love In The Garden, bulletin d’absence trop joyeux pour être vrai, du rock avec un refrain qui claque et Baxter marmonnant toujours ses paroles amères. Soit la classe incarnée et abandonnée.