04 juillet 2007

Et au sommet coule une rivière


Okkervil River - A Hand To Take Hold Of The Scene (MP3)

Le rock, c'est le monde des gauchers. Des types contrariés, dévoyés, malhabiles, aux mauvaises fréquentations, des folkeux ratés qui ont décidé de crier plus fort que les autres ou, un jour, à l'âge de douze ans, d'emmerder le type qui joue Imagine à la guitare sèche en colo en lui cassant sa guitare sur le crâne.

Un disque de rock réussi est donc souvent un disque folk raté. Défiguré. Quand on écoute Okkervil River, on a l'impression de deviner les chansons folk qui se cachent derrière les sanglots coléreux de Will Sheiff, prête à ressurgir unplugged pendant une traversée du désert ou sur un plateau de MTV.

Du moins avant que son créateur ne les défigure. Avec tambours et trompettes, The Stage Names, leur nouveau disque, aurait pu s'appeler New Adventures In Hi-Fi : autrement dit, constituer une bonne illustration de l'adage "travailler plus (l'emballage) pour gagner plus (de fans)" à coups de riffs accrocheurs, de rythmiques qui tombent à l'heure tapante, de pianos dégringolant l'escalier pour mettre fin au morceau. Et même d'une fausse reprise des Beach Boys à la sauce folk-punk en bout de course, histoire d'emmerder le copyright en même temps que les fanatiques de l'acoustique.

The Stage Names est un disque pour ceux qui pensent qu'il y autant, voire plus de beauté, dans le Springsteen de Born To Run que de Nebraska, dans un mélo en technicolor que dans un road-movie fauché en noir et blanc. Il commence par cet aveu implicite : Our life is not a movie, or maybe. Bien sûr que si, les gars, votre disque est un film : à vingt-quatre notes par seconde, il abolit l'ennui et les temps morts, évite la complaisance et la prétention. Vous l'avez bien mérité, votre prix d'interprétation.