L’anachronisme est un humanisme
Richard Swift - Dressed For The Letdown (MP3)
Richard Swift - The Song From The National Freedom (MP3)
On ne rend pas assez hommage aux bornes d’écoutes. Je suis reconnaissant à celle de la FNAC des Halles pour la rencontre avec Richard Swift. A l’époque, je postais des chroniques depuis un cybercafé de Vincennes, je menais une existence pas encore connectée, le hasard me guidait encore dans mes achats. Cette fois-ci il faisait bien les choses. Emballé, je me suis attelé à une chronique parsemée d’une phrase de gratte clavier convenue, mais qui situait bien le garçon : « un doux dingue anachronique et invendable ». Swift citait Randy Newman et Harry Nilsson comme références récentes, brandissait un appareil argentique sur la pochette, laissait son époque s’essouffler. Il était frisé en plus.
On se rattache souvent à ces histoires d’outsider, ours misanthrope, condamnés à être les contemporains des Kasabian, livreur de spleen et de mélodies surannées à une clique d’âmes torturées pour pas chère (je m’y incorpore sans honte). Avec son troisième album Dressed Up For The Letdown, Richard Swift relève l’écueil du songwritter solitaire : à savoir la chanson intègre mais fauchée qui finira par devenir chiante avec le temps. Dans l’idiome giscardien on dirait que le garçon relève le défi de l’ambition dans la modestie. L’ambition d’un héros ordinaire capable de trousser une grande chanson à l’aide d’un piano, d’une voix, d’une humanité.
Dans le chanson Dressed Up For The Letdown, une phrase dit “the right songs for the wrong crowd” je ne sais pas où elle veut en venir, mais j’ai envie de la répéter. Elle me capte, comme la musique qui lui tient la main. Un chant drapé dans la brume, des claquettes sur le parquet d’un saloon et le spleen toujours un peu. Richard Swift doit avoir 29 ans, mais je ne sais pas à quelle époque il les a soufflés. Parfois, on croirait entendre un Elliot Smith apaisé, ne cherchant plus le monopole du cœur poignardé.
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