MP3 blog : enfin une polémique

Il fallait que ça arrive. La blogosphère, c'est avant tout l'art de la polémique. Les audioblogs français viennent de s'y mettre. En attendant la polémique sur l'omniprésence des trentenaires à
La Blogothèque ou le prénom pourri de
David F, c'est
ORTF qui, en une phrase (
"Et ici, 640 visiteurs uniques et des poussières en deux jours et pas un seul commentaire ...") a mis le feu aux poudres et brûlé tous nos idéaux.
Là-dessus, nos amis de Podvains renchérissent via un
post assassin digne d'un Sarkozy en visite à La Courneuve. Extraits :
"Il est intéressant de noter que certains pensent trouver via les audioblogs un supermarché à mp3" ;
"Nous avons l’impression de travailler dans le vide". Et pan dans la gueule du pauvre lecteur passif ! Les internautes devraient arrêter de prendre les blogs pour des robinets à musique et se bouger un peu plus le cul pour lire les articles et poster des comms.
Green est bien d'accord.
David F un peu moins.
Ici à Interprétations Diverses, on boit des pastis en attendant l'accalmie. Et on se dit que les bloggeurs sont un peu pris à leur propre piège. La démarche du passionné désinteressé dérive doucement vers le besoin de reconnaissance. Le "merci" deviendrait indispensable à tout effort. Comme si notre boulot, de salut public, méritait récompense. Si je suis parfois un peu déçu par le manque de réaction sur des posts qui me tiennent à coeur, je ne reprocherai jamais à quiconque une démarche passive sur mon blog. Qu'il télécharge, qu'il télécharge. Et tant pis s'il ne lit pas. J'aurai au moins partagé avec lui le plus important, la musique. Et ça, la presse musicale et les webzines ne le peuvent pas.
Jusqu'à preuve du contraire, il me semblait que les MP3 blog tiraient leur substance de ces fameux MP3. Alors pourquoi s'offusquer du téléchargement de ces derniers?

Blue Orchids -
The house that faded out (MP3)
Je pique
l'idée à nos amis de la Blogothèque (mais plagiat avoué est à moitié pardonné) : les soldes, c'est vraiment bien. On fouille pendant trois heures dans de grands bacs, parfois en plein soleil, on slalome entre les albums de mauvais r'n'b (pléonasme ?) et les compiles de disco italienne, et on finit par trouver une perle rare.
Celle de mon mercredi répond au nom de Blue Orchids. Non, ce n'est pas un groupe d'ados qui a trop écouté
le dernier single des White Stripes. Pas davantage l'auteur d'une pop délicate estampillée Inrocks 87 (ce que je croyais pourtant en passant à la caisse, vu le nom). Non,
From severe to serene (Peel sessions plus) regroupe en réalité des morceaux post-punk datant du début des années 80.
The house that faded out, enregistré chez John Peel en décembre 1980, correspond
a priori aux canons du genre : guitare raide comme la justice, batterie raide comme une boîte à rythmes, chanteur raide comme un parapluie. D'un coup, le morceau est pourtant imperceptiblement changé : un orgue fait tapisserie derrière, des choeurs font "haha" et montent dans les aigus. Comme si les Blue Orchids avaient invité les Stranglers et les Beach Boys à les rejoindre dans un garage de Manchester.
A part ça, j'ai également acheté en soldes un disque d'un autre groupe de Manchester. Pour ne pas nuire à la réputation d'Interprétations diverses (
"Comment, il n'avait pas encore ce chef-d'oeuvre ?"/
"Quoi, il écoute ces espèces de crétins ?"), je me contenterais de dire qu'il s'agit du premier album enregistré par deux frères du coin, en 1994. Débrouillez-vous avec ça.

Orange Juice -
Blue boy (MP3)
Orange Juice -
Poor old soul (part one) (MP3)
Pour le grand public, le nom d'Edwyn Collins est à jamais associé à un tube,
A girl like you. Ironie de l'histoire : le chanteur d'Orange Juice a dû attendre quinze ans d'efforts pour enfin pénétrer les charts. La carrière de sa formation, notamment responsable de l'excellent
You can't hide your love forever, comptait pourtant déjà un grand nombre de pépites, compilées sur
The Glasgow School, à paraître le 25 juillet.
Au programme, des versions alternatives des titres du premier album du groupe (charmantes, mais moins brillantes que les définitives) et les premiers singles parus sur le légendaire label Postcard. Raideur rythmique, guitares vrillantes et débit vocal saccadé (
Blue Boy) : Orange Juice était post-punk. Arrangements brillants, chant charmeur (
Poor old soul, pt. one) : Orange Juice était pop-soul. Conclusion logique : Orange Juice était Franz Ferdinand, vingt ans avant. D'ailleurs, Alex Kapranos ne manque jamais une occasion d'avouer
l'influence de ses confrères écossais.

The Tears -
Refugees (MP3)
Noel Gallagher (
interview à
Select Magazine) :
« Let's face it, if Suede are the biggest band in the country... Bernard's a genius, as a matter of fact, and Brett seems to know what he's going on about in interviews, but I'm sorry, man, he sounds like ???? when he's singing. »Cela se passait en août 1996. Noel Gallagher, qui en avait marre de taper sur Blur, s’était trouvé un nouveau hobby : taquiner Suede. On ne sait pas si c’est fait exprès mais, en 2005, Oasis (
Don’t believe the truth) revient en même temps que Suede.
Ou presque… Leur ancien groupe mis en stand-by, le tandem Bernard Butler-Brett Anderson est de retour avec une nouvelle formation, The Tears, et un album titré
Here come The Tears, disponible seulement en import pour l’instant. Dès l’écoute de
Refugees, premier titre de l’album, le temps béni de
So young ou
Animal nitrate refait surface : les guitares hurlent, la batterie cogne, l’ensemble est merveilleusement surproduit et Brett Anderson vocalise avec sa puissance habituelle. Du glam lyrique et flamboyant, en somme. Comme celui de Suede.

The Mountain Goats -
You or your memory (MP3)
The Mountain Goats -
Dilaudid (MP3)
Le
New Yorker l'a tout simplement
qualifié de
"America’s best non-hip-hop lyricist". Pourtant, John Darnielle (à droite sur la photo), leader des Mountain Goats, n'est pas très connu en France. Ne rêvons pas :
The Sunset Tree, treizième album du groupe en seulement dix ans, ne changera sans doute pas la donne.
A son écoute, pourtant, ce sont des comparaisons flatteuses qui surgissent : Dylan, bien sûr, pour ce timbre légèrement nasal ; Robert Forster des Go-Betweens, dont Darnielle reprend parfois le chant inquiet et acide (
Dilaudid) ; ou le Yo La Tengo de
Fakebook (un chef-d'oeuvre absolu, est-il besoin de le rappeler) pour ces mélodies folk-rock si
americana (
You or your memory).
Les Mountain Goats n'auront pourtant sans doute jamais le succès des Go-Betweens ou de Yo La Tengo, eux-mêmes déjà absents des charts. Il ne reste plus qu'à prier pour que le chiffre treize leur porte cette fois-ci bonheur.
Désolé pour la semaine et demie d'interruption éditoriale. On reprend avec du hip-hop destiné aux deux, trois internautes qui traînent encore devant leur clavier à l'heure qu'il est.
Common -
Testify (MP3)
Common était sorti du commun en 2003 avec l'album
Electric Circus. Pas franchement un coup d'essai puisque le rappeur de Chicago en était déjà à son cinquième album. Mais plutôt un gros coup de projecteur sur ses talents de MC éclectique, toujours prêt à noyer son hip-hop dans la culture black au sens large (soul, blues...).
Avec
Be, qui sort en ce moment, Common frappe plus fort que jamais avec un album ramassé (11 titres, loin des formats du rap américain). Reprenant la formule de son nouveau producteur Kanye West, le Chicagoan joue le tube à tous les coups. Avec un art du hip-hop qui fait en ce moment des émules : samples vintage, musicalité assumée et coolitude sous-jacente.
Testify est un OVNI rapologique. Un terrain d'affrontement entre la voix de Common et une voix féminine, mi-sampliste, mi-duettiste.
"It's better to burn out than fade away" : Kurt Cobain applique le vieil adage de son modèle Neil Young et se suicide le 5 avril 1994. Les rock critics oublient de se tirer eux aussi une balle dans la gueule. Tant mieux: l'année sera prospère.
Supergrass -
Caught by the fuzz (MP3)
Alors que Liam Gallagher et Damon Albarn aimeraient profiter de la mort du pape pour le remplacer, 3 sales gosses aux têtes pas possibles pointent le bout de leur nez. Supergrass et son single
Caught by the fuzz réveillent l'Angleterre à coup de guitares punk et d'histoires adolescentes. Urgence et hédonisme : la britpop est contestée sur ses propres terres.
Stereolab -
Ping Pong (MP3)
Parallèlement , un groupe de Londoniens continue un parcours sans faute. Les Stereolab, marxistes notoires et adeptes du krautrock, enregistrent leur quatrième album,
Mars Audiac Quintet. Pour
Ping Pong, ils lâchent leurs influences musicales allemandes mais certainement pas Marx; la chanson n'étant rien de moins que la reprise d'une théorie économique du philosophe :
"Bigger slump and bigger wars and a smaller recovery / Huger slump and greater wars and a shallower recovery". Que ceux qui passent leur bac demain s'en souviennent.
Guided By Voices -
Echos Myron (MP3)
De l'autre côté de l'Atlantique, 1994 est l'année de la découverte d'un groupe déjà vieux de plus de 10 ans. C'est seulement avec le remarquable
Bee Thousand que les Guided By Voices sont sortis de leur trou de Dayton dans l'Ohio. Grand succès critique pour ces guerriers de la lo-fi, combattants infatigables de la pop song expédiée en moins de 3 minutes.
Echos Myron, et sa mélodie infectieuse, est un modèle du genre.
Sonic Youth -
Screaming Skull (MP3)
1994, c'est aussi le début de l'âge adulte pour Sonic Youth avec
Experimental Jet Set, Trash and No Star. Plus vraiment des adolescents rebelles, les New-Yorkais sont devenus les parrains de la scène indé américaine. Et en aînés modèles, ils finissent par s'apaiser (sans toutefois renoncer complétement à l'orthodoxie sonique).
Screaming Skull est une petite concession à leurs expériences passées et surtout une enième et convaincante manière de fignoler une chanson punk.

The Shortwave Set -
Is it any wonder (MP3)
Ils sont encore peu connus et c'est peut être prématuré d'affirmer qu'ils forment un bon groupe. Mais parmi les 4 titres qu'ils ont pour le moment sorti, les Shortwave Set ont déjà pondu une merveille. Et ça suffit à notre bonheur.
La chanson en question s'appelle
It is any wonder et est présente sur leur premier
EP 3 titres. C'est sucré, c'est rétro. C'est parfait pour aborder l'été en pente douce.
Débarquement anglo-saxon pour fêter le 6 juin au Grand Mix : la salle tourquennoise accueille ce soir HAL et Adam Green.

HAL –
I sat down (MP3)
The Moldy Peaches –
On top (MP3)
Adam Green –
Her father and her (MP3)
Les amours balnéaires des premiers cités se portent pourtant plus vers la Californie que la Normandie, vers
Surfin’ USA que
Le jour le plus long. Les Irlandais de
HAL partagent en effet avec leurs compatriotes des Thrills un goût pour les références ensoleillées (cinq volumes de Beach Boys, un doigt de Burt Bacharach) et la pop song imparable (le bien nommé
Play the hits). Et si leur
album est encore un brin inégal, il contient quelque chose d’impalpable, un petit plus qui manque aux disques des Thrills. C’est peut-être un vrai producteur (le génial Edwyn Collins) ou un talent plus grand pour les ballades, comme
I sat down, porté par un gimmick de banjo entendu mille fois chez… les Thrills. C’est plus sûrement un petit détail généalogique : les deux songwriters,
Paul et Dave Allen, sont frères. Et l’album reflète cette part d’enfance, d’innocence, qui a uni les membres du groupe. Ecouter les chansons de HAL fait vite fait revenir des souvenirs de châteaux de sable, de coups de soleil et de chansons reprises à tue-tête sur le siège arrière de la voiture familiale. Idéal à l’approche des vacances.
Autre grand enfant invité à veiller avec les adultes ce soir au Grand Mix,
Adam Green. Prodige, l’enfant : le jeune homme a sorti il y a deux ans un classique instantané, le bien-nommé
Friends of mine, chef d’œuvre qui lui valut des amis chez les poppeux du monde entier. Avec
Gemstones, sorti cette année, il continue sur la même voie. L’art d’Adam Green est typiquement enfantin : c’est celui du jeu, du déguisement assumé avec une part de candeur, une de rigolade. Du temps où il se produisait avec Kimya Dawson au sein des excellents
Moldy Peaches, il avait pour habitude de se travestir en Robin des bois sur scène. Aujourd’hui, il aime à endosser les panoplies de Leonard Cohen (influence flagrante sur
Her father and her, extrait de son
premier album solo), Frank Sinatra, Jonathan Richman ou Scott Walker. Avant, comme un sale gosse, de leur faire chanter des paroles sans queue ni tête ou des mélodies improbables. Le jour où le LSD remplacera le verre de lait dans les écoles primaires, tous les enfants chanteront comme Adam Green.
Fête des grand-mères
Don't teach your grand ma how to suck eggs : joli titre pour ce nouveau blog qui prône l'isolation culturelle des vieux. Pour l'instant, un excellent MP3 de Low, du Sonic Youth, du Mùm, du hip-hop américain et la vague impression qu'on a un peu les même goûts.
Politiquement, ce blog se situe dans une tendance montante de l'audioblogosphère française : le blog MP3 branché. En matière de de liens, il affiche d'ailleurs des préférences très claires :
Musique Perverse et
Frootylootybootymoviegoonie, deux blogs avec qui il partage le template Blogspot noir et une certaine idée de la musique.
La Blogothèque n'a qu'à bien se tenir. Faudra quand même prévenir Télérama.
Le spectre de la récession pointant en France, Interprétations Diverses a été sommé par ses actionnaires de se trouver un tube de l'été. Nous nous sommes exécuté.

Out Hud - It's for you (MP3)
TF1 nous ayant piqué la Californienne Triim et son
Pop The Music, en catastrophe, nous avons dû appeler Pascal Nègre pour trouver une solution de repli. Après avoir refusé un groupe mexicain pour des raisons éditoriales, nous nous sommes finalement rabattu sur
It's For You de Out Hud. Que nous diffuserons en streaming sur le blog tout l'été, avec ouverture d'un pop-up renvoyant à une marque de préservatifs qui a accepté de sponsoriser l'événement.
Alors pourquoi Out Hud ? Le deuxième album des New-Yorkais,
Let us never speak of it again, vient de sortir et en rappelle fortement un autre : le premier album de !!! (d'ailleurs 3 membres de !!! font parti d'Out Hud). Même rock suintant d'ecsatsy, même psychédélisme déchaîné, on croirait voir une copie si Out Hud n'avait fait le choix d'une voix féminine.
Profitant de cette voix qui sait aller jusqu'à la pop putassière, Out Hud s'offre, avec
It's for you,
un tube à la Caroline de Monaco. Parfait pour pavoiser sur la plage, délicieux pour pécho jusqu'à plus d'heure et assez moite pour finir la nuit.
Interprétations Diverses a en tout cas fait son choix.
Une fois n'est pas coutume, une revue de web spécial hip-hop. Parce que la pop, c'est comme tout, au bout d'un moment, ça tape sur les nerfs.

Lil' Kim feat. Sisqo -
How many licks (MP3)
Dr Gonzo s'interroge : "En l'an 2000, serions-nous passé à côté d'une bombe rap, acide et perverse ?". Et devant cette bombe signée Lil' Kim, on se dit qu'effectivement, les archives du hip-hop américain mériteraient d'être fouillées un peu plus en profondeur (comme Lil' Kim, d'ailleurs). Ce serait en tout cas une solution face à l'ennui qui prédomine aujourd'hui.
(via
Musique Perverse...)

Faith Boogie -
Let me do my thang (MP3)
Elle n'a que 14 ans (soit 9 de moins que Lorie) et pourtant, cette Américaine sonne déjà comme une M.I.A. transatlantique. La Nouvelle Star ?
(via
Music (for Robots))

JDB -
Still dirty as Harry (MP3)
Les bootlegs à la 2 Many DJ's, c'est souvent très léger mais c'est parfois surprenant. Ainsi cette version de
Dirty Harry de Gorillaz boostée par le beat ultra-célèbre du
Still Dre de Dr. Dre. Manque quand même le "Yeeah nigga ! You're still fuckin' wichya ?" de Snoop Dogg mais on ne peut pas tout avoir.
(via
Bootlegs, Mash-up & Bastard-pop)